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l’hypnose

Mon parcours, de l’enfant qui voyait la vie en rose malgré le chaos familial à la chercheuse en neurosciences, m’a toujours ramenée à une seule et même conviction : l’hypnose n’est pas qu’un outil thérapeutique, c’est l’intelligence même, une philosophie de vie.

J’ai découvert l’hypnose très jeune, vers 8 ou 9 ans, lors de réunions appelées « La relax ». Ces sessions m’ont appris à diriger mes pensées, à créer des mantras pour me donner des automatismes positifs comme « Je veux, je crois, je réussis ». L’hypnose m’a permis d’exercer ma joie et de rester cette petite fille qui voyait la vie en rose, malgré les déchirements qui auraient pu être dévastateurs. J’ai compris très tôt que l’imagination était mon super-pouvoir et que l’hypnose en était le révélateur.

Ma trajectoire professionnelle, de la psychologie aux neurosciences, a ensuite permis de boucler la boucle. Mon travail de thèse sur l’hypnose et la douleur chronique a mis en lumière un postulat fondamental : la douleur chronique est une forme d’autohypnose négative. Partant de là, l’évidence m’est apparue : si la douleur est une autohypnose négative, alors la montée en intelligence et en performance n’est autre qu’une autohypnose positive.

L’hypnose : un processus en deux étapes

L’hypnose, telle que je la conçois, repose sur la compréhension que ce n’est jamais la vie qui nous fait souffrir, mais la façon dont nous l’interprétons.

1. L’état modifié de conscience (la transe) :

On commence par accompagner le sujet vers un état de conscience différent, que l’on nomme transe, état hypnotique ou absorption. Cet état est essentiel car plus on réfléchit et on raisonne (Système 2), plus on juge et on soulève des objections, ce qui nous empêche d’accueillir un nouvel état d’esprit. L’hypnose vise une dépotentialisation de la conscience en tant qu’instrument de raisonnement algorithmique (logique séquentielle) pour atteindre une plus grande souplesse d’esprit.

Sur le plan cérébral, cet état est sous-tendu par une diminution de l’activité du réseau de mode par défaut (DMN). La transe est avant tout une absorption mentale et une tunnélisation attentionnelle où le sujet est pleinement attentif à son expérience intérieure et insensible aux stimulations externes polluantes. C’est une porte d’entrée.

2. La suggestion (le message qui transforme) :

L’état d’absorption n’est qu’une ouverture ; pour qu’il y ait hypnose complète, il faut la transmission d’un message. L’hypnose formelle vise à faire passer le sujet d’un système de pensée inadapté à un autre. C’est un outil de persuasion très puissant, qui utilise principalement la suggestion pour convaincre le cerveau d’adopter une nouvelle attitude mentale. La suggestion n’est pas une injonction, mais une communication discrète, qui agit masquée, souvent via la métaphore. L’hypnose repose entièrement sur l’imagination (ou imagerie mentale) pour recadrer les pensées, puisque c’est un dialogue entre deux imaginaires. Les paroles deviennent ainsi action.

L’Hypnose comme vecteur d’intelligence

J’ai défini l’intelligence non comme une capacité (telle que la philocognition), mais comme un état qui permet de révéler nos capacités. L’hypnose est le vecteur par excellence de cet état d’intelligence.

L’état hypnotique ressemble au flow, ce moment de performance où tout semble facile, où l’on est en parfaite connexion avec l’environnement (la résonance).

Être en intelligence, c’est moduler ses représentations mentales pour favoriser sa propre croissance et orienter son attention vers les opportunités. Cela demande de faire confiance à l’inconscient cognitif (le Système 1 de Kahneman) qui gère 90 à 95% de notre activité cérébrale et excelle dans la pensée heuristique (par associations et métaphores).

La philosophie hypnotique

Lorsque l’hypnose est pratiquée en autohypnose, elle devient nécessairement une philosophie. Elle nous libère des conditionnements en nous donnant le pouvoir de reconditionner nos propres dispositions mentales.

En définitive, l’hypnose est une raconteuse d’histoires qui transforme la parole en acte (langage performatif). C’est une démarche d’excellence qui nous incite à affirmer notre différence et à devenir le capitaine de notre destin, car « tout ce qui peut être imaginé est réel » (Pablo Picasso).

Avec mes patients

Aujourd’hui je pratique l’hypnose au quotidien pour moi-même et avec mes patients… car oui, l’hypnose par téléphone, c’est tout à fait possible… et même encore mieux, si tu vous voulez mon avis.

L’hypnose à l’épreuve des neurosciences et des patients

Mon travail de recherche a visé à prouver cette hypothèse en clinique, notamment en utilisant la Tomographie par Émission de Positons (TEP) pour étudier la modulation de la douleur chronique lombaire. La douleur chronique, définie comme persistant au-delà de trois mois et résistant souvent aux traitements, est un mal insidieux, invisible et particulièrement handicapant.

Nous avons observé que les patients souffrant de douleur chronique présentaient souvent des processus psycho-cognitifs spécifiques, tels que la capture de l’attention par le vécu nociceptif, une tendance au catastrophisme, et une anticipation négative des symptômes. Ces mécanismes peuvent conduire à des symptômes dépressifs, l’état dépressif étant considéré comme le plus puissant prédicteur de la chronicisation de la douleur. La douleur chronique s’apparente alors à un enfermement quasi hypnotique.

Nos résultats par TEP ont démontré l’efficacité de l’hypnose sur les patients lombalgiques : la douleur perçue a diminué de 64% après l’état hypnotique, contre seulement 28% après l’état d’éveil normal.

Plus important encore, nous avons mis en évidence deux réseaux neuronaux distincts :

1. En état d’éveil normal :

La suggestion analgésique active un réseau cognitivo-sensoriel (incluant le cortex frontotemporal, l’insula, le cortex somatosensoriel et le cervelet).

2. En état hypnotique :

L’hypnoanalgésie active un réseau émotionnel (incluant le cortex frontotemporal, l’insula, le noyau caudé, le nucleus accumbens, les noyaux lenticulaires et le cortex cingulaire antérieur (CCA)). Ces régions sont impliquées dans la modulation émotionnelle de la douleur et le système de récompense, suggérant que l’hypnose module la douleur en activant des émotions positives.

Nous avons également différencié les modes de suggestion :

  • La suggestion directe (faisant référence à la douleur et à son soulagement) activait surtout les processus cognitifs dans le cortex frontal et préfrontal.
  • La suggestion indirecte (faisant référence au bien-être général) mobilisait un réseau plus étendu et plus émotionnel.

L’hypnose s’est révélée plus efficace que l’éveil pour les deux types de suggestion, probablement grâce à l’efficacité du réseau émotionnel.